3.

Lorsque je regagnai ma voiture, le téléphone grésillait et le signal « message enregistré » clignotait sur l’appareil. Le message provenait de Candace :

« Gunner, une Délégation de Trêve s’est présentée au Statler-Bills pour suivre les élections et tenez-vous bien : l’un de ses membres est un Arcturien ! »

Le travail de mes équipes n’était pas si mauvais, après tout – seulement d’une lenteur impardonnable. Mais cette constatation ne m’apportait qu’un piètre réconfort.

J’appelai l’hôtel et fus mis en relation avec l’un des membres de la Délégation de Trêve – c’est ce que l’hôtel pouvait faire de mieux pour moi. Le membre de la Délégation, un colonel, répondit : « Oui, Mr. Knafti est au courant de votre travail et ne désire pas spécifiquement vous voir. Il s’agit d’une Délégation de Trêve, Mr. Gunnarsen. Savez-vous exactement ce que cela signifie ? »

Sur quoi il raccrocha.

Je savais fort bien ce que cela signifiait – non-ingérence stricte sur toute la ligne – seulement j’ignorais qu’ils respecteraient à la lettre leurs engagements.

C’était pour moi un sacré coup dur, de quelque façon que j’envisage la question. On me faisait passer pour un sot aux yeux de Connick alors que j’aurais voulu lui inspirer de la crainte. Car il est de fait que les Arcturiens puent – et les relations publiques deviennent déplorables lorsque le produit que vous représentez sent l’ail pourri à trente mètres à la ronde. Je ne voulais pas que les électeurs aient l’occasion de les flairer.

Et par-dessus tout, en raison des conclusions hâtives qu’en tirerait l’électeur à sang chaud, à l’esprit buté autant que confus. Dis donc, Sam, tu as appris la nouvelle ? Il paraît qu’un Arcturien est arrivé pour espionner. Oui, Charley, ces punaises nous accusent pratiquement de truquer les élections. Tu as diantrement raison, Sam, et tu ne connais pas la meilleure ? Ils puent, Sam.

Une demi-heure plus tard, je reçus un appel direct de Haber. « Gunner, mon vieux ! Bon Dieu, cette fois c’est la fin des haricots !

— Apparemment, vous avez appris la présence de l’Arcturien dans la Délégation de Trêve, dis-je.

— Comment, vous le saviez et vous ne m’en disiez rien ? »

J’avais été à deux doigts de l’engueuler pour ne m’avoir pas averti mais, de toute évidence, cela ne m’aurait pas avancé à grand-chose. J’essayai néanmoins, mais il se retrancha derrière son ignorance crasse. « Ils ne m’ont rien dit, à Chicago. Est-ce ma faute ? Soyez juste, mon vieux Gunner ! »

Le vieux Gunner raccrocha sans autre forme de procès.

Je commençais à me sentir de plus en plus somnolent. Un instant je songeai à prendre un excitant, mais le léger bourdonnement que l’alcool de Connick avait laissé dans mon crâne était assez agréable et, de plus, il se faisait tard. Je me rendis à la chambre d’hôtel que Candace avait retenue pour moi et me glissai entre mes draps.

Il me fallut quelques minutes à peine pour m’endormir, mais j’avais faiblement conscience de la présence d’une odeur. C’était l’hôtel où était descendue la Délégation de Trêve.

Je ne pouvais être en train de sentir l’odeur de cet Arcturien, ce Knafti. C’était sûrement mon imagination. C’est ce que je me dis en me laissant de nouveau glisser dans le sommeil.

Le phonoreiller grésilla et la voix de Candace se fit entendre : « Réveillez-vous et mettez-vous en tenue décente, Gunner. Je monte. »

Je parvins à m’asseoir, secouai la tête et aspirai quelques bouffées d’amphétamine. Comme d’habitude, ça me réveilla d’un coup, mais, comme d’habitude, avec l’impression de manquer de sommeil. Je passai néanmoins une robe de chambre et je préparais le déjeuner dans la salle de bains lorsqu’elle frappa à la porte. « C’est ouvert ! criai-je. Voulez-vous du café ?

— Certainement », dit-elle. Elle s’avança sur le seuil de la porte et me regarda faire bouillir de l’eau et remplir deux tasses. J’y versai de la poudre et éteignis le réchaud. « Jus d’orange ? » Elle prit le café et secoua la tête. J’en préparai juste un verre et l’avalai. Puis je transportai le café dans l’autre pièce. Le lit s’était déjà transformé : c’était à présent un divan sur lequel je m’étendis pour déguster un second café. « Eh bien, ma chère, dis-je, quelle petite saleté avez-vous découverte sur Connick ? »

Elle hésita puis ouvrit son sac dont elle tira une photocopie qu’elle me tendit. C’était la reproduction d’un document, avec un en-tête en caractères anciens : L’Armée des États-Unis, au-dessous duquel on lisait :

Il est porté à la connaissance de tous les hommes que

DANIEL T. CONNICK
ASIN AJ 32880515

a, ce jour, été exclu du service des États-Unis sur ordre du gouvernement. Il est en outre porté à la connaissance des hommes que les raisons de son exclusion sont déshonorantes.

« Eh bien, que vous disais-je, ma chère ? Il y a toujours quelque chose. »

Candace termina son café, posa soigneusement la tasse sur le bord de la fenêtre et prit une cigarette. Cela lui ressemblait bien : elle ne faisait jamais qu’une seule chose à la fois, le genre d’esprit ordonné avec lequel je ne pouvais rivaliser… et que d’ailleurs je ne pouvais pas supporter. Sans doute savait-elle ce que je pensais puisqu’elle faisait probablement la même réflexion que moi ; mais il n’y avait pas de nostalgie dans sa voix lorsqu’elle dit : « Vous êtes allé le voir hier soir, n’est-ce pas… et pourtant cela ne vous empêchera pas de le poignarder dans le dos ?

— Je vais prendre les mesures nécessaires pour qu’il soit battu aux élections, en effet. C’est pour cela qu’on me paie, moi et quelques autres.

— Non, Gunner, dit-elle, ce n’est pas pour cela que M. & B. me payent, si c’est là ce que vous voulez dire. Je ne gagne pas assez. »

Je me levai et m’approchai d’elle. « Encore un peu de café ? Non ? Moi non plus. Mon chou… »

Candace se leva et traversa la pièce pour venir s’asseoir sur une chaise à dossier droit. « Vous avez des réveils brutaux, hein ? Ne changez pas de conversation. Nous parlions de…

— Nous parlions, lui dis-je, d’un travail que nous sommes payés pour exécuter. C’est entendu, vous en avez accompli une partie pour moi. Vous m’avez obtenu ce que je désirais sur Connick. »

Je m’interrompis en la voyant secouer la tête. « Je n’en suis pas tellement sûre.

— Que voulez-vous dire ?

— Eh bien, l’explication ne se trouve pas dans la photocopie, mais je sais dans quelles circonstances on l’a puni : “Désertion dans l’exécution d’une mission dangereuse.” Cela se passait sur la Lune, en l’année 1998, dans les forces spatiales des Nations-Unies. »

J’inclinai la tête car j’avais compris ce dont elle parlait. Connick n’était pas le seul dans son cas. La moitié de la Force spatiale avait craqué cette année-là. C’était au mois de novembre. Une forte averse de météorites des Léonides coïncidant avec une explosion solaire. L’état-major de la Force spatiale avait décidé de sévir et demandé à l’armée U.S. de faire passer en cour martiale tous les soldats qui avaient déserté leur poste pour se réfugier dans les abris souterrains. L’armée s’était sentie obligée d’accéder à cette demande. « Mais la plupart d’entre eux avaient bénéficié d’une mesure de clémence présidentielle, dis-je. Pas lui. »

Candace secoua la tête. « Il ne l’a pas sollicitée.

— Hum. Eh bien, son nom est toujours dans les archives. » Je changeai de sujet. « Autre chose. Et ces Enfants ? »

Candace tira sa cigarette de sa bouche, se leva : « C’est pour ça que je suis là, Gunner. C’était noté sur votre liste. Alors… habillez-vous.

— Pourquoi ?

Elle sourit : « D’abord pour ma tranquillité d’esprit et ensuite pour vous rendre compte de l’état des enfants, comme vous dites. J’ai pris rendez-vous. Vous devez être à l’hôpital dans cinquante minutes. »

Il faut vous souvenir que je ne connaissais rien sur les Enfants, si ce n’est de vagues rumeurs. Grâces en soient rendues à Haber, il n’avait pas jugé nécessaire de fournir des explications. Quant à Candace elle s’était contentée de dire : « Attendez d’être à l’hôpital, vous constaterez par vous-même. »

L’hôpital général Donnegan se composait de sept étages en briques de céramique crème, avec air conditionné et éclairage mural. De minuscules lampes aseptiques émettaient leur lumière bleue à l’ouverture des puits de ventilation. Candace remisa la voiture dans un garage souterrain et me conduisit à un ascenseur puis à une salle d’attente. Elle semblait fort bien connaître les lieux. Elle consulta sa montre, me confia que nous avions deux minutes d’avance, et me désigna une carte murale où des lampes colorées indiquaient aux visiteurs le chemin à suivre pour se rendre à leurs différentes destinations. Elle montrait également, de façon impressionnante, les dimensions et la complexité du Donnegan. L’hôpital possédait vingt-deux salles d’opération complètement équipées, une banque d’organes, un complexe de radiologie, une salle de cryogénie, la plus complète installation de prothèses existant sur Terre, une section de gérontologie et d’innombrables salles réservées aux thérapeutiques les plus diverses…

Et par-dessus tout, une aile de pédiatrie complètement équipée et occupée.

« Je pensais que l’établissement était réservé aux vétérans.

— C’est exact. Voici notre homme. »

Un officier de marine s’approchait, souriant, la main tendue. « Bonjour, je suis heureux de vous voir. Vous êtes sans doute Mr. Gunnarsen ? »

Candace fit les présentations et nous échangeâmes une poignée de main.

Le nouveau venu était un certain commandant Whitling ; elle l’appelait Tom. « Il va falloir nous dépêcher, dit-il. Depuis notre entrevue il s’est produit un grand chambardement… un haut personnage doit venir inspecter l’établissement à onze heures. Je ne voudrais pas vous presser, mais j’aimerais bien que nous nous fassions discrets… Tout ceci est un peu irrégulier.

— Je vous remercie d’autant plus d’avoir bien voulu accéder à notre demande, dis-je. Nous vous suivons. »

Nous nous dirigeâmes vers un ascenseur qui nous déposa au dernier étage de l’immeuble, dans un couloir couvert d’affiches représentant des personnages de Disney et de Ma Mère l’Oye. D’un solarium nous parvinrent les notes grêles d’une boîte à musique. Trois enfants qui se poursuivaient dans le couloir passèrent devant nous en criant. Ils filaient à bonne allure si l’on pense que deux d’entre eux marchaient avec des béquilles. « Que diable faites-vous ici ? » demanda le commandant Whitling d’une voix sévère.

Je regardai autour de moi mais ce n’était ni à moi ni aux enfants qu’il s’adressait. Il parlait à un homme au visage jeune, mais qui portait une forte barbe noire et se tenait, l’air coupable, derrière un mobile de Donald le Canard.

« Oh ! Mr. Whitling, dit-il, j’ai dû me perdre encore en cherchant la cantine.

— Carhart, dit le commandant d’un ton menaçant, si je vous trouve encore dans cette aile, vous n’aurez plus à vous inquiéter de la cantine d’ici un an. Vous m’avez compris ?

— Oui, Mr. Whitling. Bien Mr. Whitling ». L’homme salua et fit demi-tour et je m’aperçus à ce moment que la manche gauche de son peignoir était vide et introduite dans une poche.

« Pas moyen de les empêcher d’entrer, dit Whitling en tendant les mains. Eh bien, Mr. Gunnarsen, voici l’endroit. Vous avez tout sous les yeux. »

Je jetai un regard autour de moi. Ce n’était partout que des enfants – des enfants boiteux, des enfants trébuchants, des enfants pâles, des enfants las. « J’ai quoi sous les yeux ? demandai-je.

— Mais les Enfants, Mr. Gunnarsen. Ceux que nous avons libérés. Ceux que les Arcturiens avaient capturés sur Mars. »

Alors je compris. Je me souvenais de la capture de la colonie martienne.

Une guerre interstellaire se déroule à une vitesse d’escargot, car il faut un temps interminable pour se rendre d’une étoile à l’autre. Les batailles principales de notre guerre avec Arcturus s’étaient livrées dans un rayon n’excédant pas la distance de la Terre à la planète Mars et les flottes s’étaient affrontées dans l’orbite de Saturne. Néanmoins, douze années entières s’étaient écoulées entre l’attaque surprise contre la colonie martienne et l’armistice signé à Washington.

Je me souvins d’avoir assisté à une reconstitution filmée de cette attaque surprise sur Mars. C’était par une chaude journée d’été – en plein midi, la glace fondait. Un vaisseau déboucha du petit soleil à son déclin, au-dessus de la colonie installée non loin des Sources méridionales.

C’était une fusée, faite d’un métal brillant de la couleur de l’or. Elle descendit, entourée d’un halo de radiations dorées semblable à la protubérance charnue d’une taupe à nez étoilé. Elle se posa sur le sable fin et orangé. Les Arcturiens débarquèrent aussitôt.

Bien entendu, à ce moment-là, tout le monde ignorait que c’étaient des Arcturiens. Ils avaient contourné le soleil suivant une longue orbite non écliptique, observant et étudiant, puis ils avaient choisi le petit avant-poste martien pour y porter leur attaque. Dans la pesanteur martienne, ils se comportaient en bipèdes – deux de leurs membres filiformes suffisant à les soutenir – et ils atteignaient la taille d’un homme moyen dans leurs tenues pressurisées dorées. Les colons s’élancèrent à leur rencontre et furent exterminés. Jusqu’au dernier. Du moins les adultes.

Les enfants, cependant, n’avaient pas été tués, en tout cas pas de manière aussi expéditive ni avec la même facilité. Certains avaient été épargnés, et quelques-uns d’entre eux se trouvaient à l’hôpital général Donnegan.

Mais pas tous.

« Alors ce sont les survivants que je vois ici ? » dis-je, la compréhension se faisant enfin jour dans mon petit intellect.

« La plupart, dit Candace qui se trouvait tout près de moi, ceux qui ne sont pas en assez bonne santé pour reprendre une vie normale.

— Et les autres ?

— La majeure partie n’a plus de famille – leurs parents ont été massacrés. Alors ils ont été adoptés par des foyers de Belport. Ils sont au nombre de cent huit, je crois. N’est-ce pas, Tom ? Et maintenant, vous avez peut-être une idée de la situation. »

Il y avait une centaine d’enfants dans cette aile de l’hôpital, mais je ne les avais pas tous sous les yeux. Certains n’étaient pas montrables.

Whitling me parla de la salle où régnait une température égale à celle du sang et où vivaient les sujets très jeunes et très atteints, mais il ne put me la montrer. Ils respiraient une atmosphère gnotobiotique, assez riche en oxygène, un peu plus humide que l’air ambiant, et sous une pression supérieure, afin de permettre à leur métabolisme de mieux réoxygéner leur organisme. Un peu plus loin, sur la droite, se trouvaient les chambres individuelles abritant les cas les plus graves. Les contagieux. Les incurables. Les infortunés dont la seule apparence était nocive pour les autres. Whitling accepta d’ouvrir quelques volets polarisés pour me permettre de jeter un coup d’œil dans quelques-unes de ces chambres où gisaient (lorsqu’ils ne se tortillaient pas comme des vers) des êtres misérables vivant dans une solitude permanente. Les Arcturiens s’étaient livrés, entre autres expériences, à des transplantations, et le projet avait dû être confié à un type du genre capricieux. Le plus jeune de ces petits malheureux avait environ trois ans ; le plus âgé dix-sept ou dix-huit.

Ils offraient un spectacle accablant et si je ne me suis guère étendu sur mes sentiments, c’est qu’ils se passent de commentaires.

Des enfants dans la détresse ! Bien entendu ceux qui avaient été réintégrés dans la population ne se trouvaient pas dans l’état de misère physiologique où je voyais ces petits. Mais ils toucheraient la corde sensible des gens puisqu’ils touchaient la mienne ; et chaque fois qu’un parent adoptif, le voisin d’un parent adoptif ou un passant dans la rue sentirait vibrer cette corde, une seule pensée lui viendrait aussitôt à l’esprit : ce sont les Arcturiens qui ont fait ça.

Car après avoir tué les adultes qui constituaient pour eux un danger potentiel, ils avaient mis en cage les jeunes qui leur semblaient les plus traitables pour s’en servir comme cobayes pour leurs recherches.

Et moi qui avais espéré contrebalancer une telle monstruosité avec cinq cents animaux arcturiens !

Durant tout ce temps, Whitling me faisait visiter l’aile entière et je discernais dans sa voix contre quoi je devais lutter ; parce qu’il aimait ces enfants et qu’il en avait pitié. « Bonjour, Terry », dit-il en pénétrant dans le solarium et en se penchant au-dessus d’un enfant dont il tapota les cheveux d’une blancheur de neige. Terry lui adressa un sourire. « Il ne peut pas nous entendre, bien sûr, dit Whitling, nous lui avons greffé de nouveaux nerfs auditifs il y a quatre semaines – c’est moi-même qui l’ai opéré – mais ils seront éliminés par l’organisme. C’est la troisième tentative. Et à chaque fois le risque s’aggrave : réaction des anticorps.

— On ne lui donnerait pas plus de cinq ans », dis-je. Whitling inclina la tête. « Mais l’attaque de la colonie s’est passée…

— Je vois ce que vous voulez dire, dit Withling. Les Arcturiens s’intéressaient également à la reproduction. Ellen – elle nous a quittés depuis deux semaines – n’avait que treize ans, mais elle avait eu six enfants. Maintenant, voici Nancy. »

Nancy avait peut-être douze ans, mais sa taille et sa coordination manuelle étaient celles d’un enfant en bas âge. Elle arriva en courant maladroitement derrière une balle, s’immobilisa en me considérant avec antipathie et suspicion. « Nancy est l’une de nos réussites », dit Whitling avec fierté. Il suivit mon regard. « Oh ! Elle n’a rien d’anormal, dit-il. Elle a grandi sur Mars. Elle ne s’est pas habituée à la pesanteur terrestre, c’est tout ; ce n’est pas qu’elle soit lente, c’est la balle qui rebondit trop vite. Voici Sam. »

Sam était presque un adolescent. Il gloussait dans son lit en se livrant à un exercice apparemment très pénible pour lui, lequel consistait à soulever sa tête du traversin. Une infirmière, vêtue d’une blouse rayée qui la faisait ressembler à un berlingot, comptait les temps : un, deux, un, deux… Il répéta l’opération cinq fois puis se laissa retomber en souriant. « Le système nerveux central de Sam était pratiquement détruit, dit Whitling avec complaisance, mais nous progressons. Néanmoins, la régénération des tissus nerveux est terriblement… » Je n’écoutais pas, je regardais le sourire de Sam qui montrait des dents noires et ébréchées. « Carence alimentaire », dit Whitling en suivant de nouveau mon regard.

« Eh bien, dis-je, j’en ai assez vu, et je vais partir avant qu’on s’avise de me faire changer les couches des enfants en bas âge. Je vous remercie, commandant Whitling. Oui, je pense que je vous dois des remerciements. Comment sort-on d’ici ? »